Carnet de route
Le SCAL à moins 500
Le 15/04/2023 par ARSON-CACERES Blandine
Le SCAL à -500!
Tout a commencé pour moi par un échange de messages.
-Tu fais quoi le week-end du 15 et 16 avril?
-rien pour l’instant.
- Alors tu viens avec nous.
Le tout accompagné d’une topo effrayante. (Cf photo topo)
Après une longue hésitation et puisque le reste de l’équipe m’en pensait capable, j’ai décidé d’accepter le défi. Nous voilà donc partis pour descendre et équiper tandis qu’une autre équipe se chargera de déséquiper. Fleur et Pierro entrent dès le vendredi pour équiper le premier grand puits. Avec Guilhem, nous arrivons sur place en fin d’après-midi et installons le campement. Nous nous approchons du trou et voyons Fleur sortir, à peine essoufflée de sa longue remontée. 167 mètres en 1/2h. Elle m’impressionne! En voyant notre campement elle nous fait remarquer que ça ne va pas du tout. Nous avons oublié une consigne et sommes donc obligés de le démonter. Quand Pierro sort à son tour, nous nous déplaçons sur le bon lieu et remontons le bivouac. La soirée est pluvieuse. Les discussions vont bon train autour de la “grosse bite irréprochable de Guilhem” et d’autres souvenirs de spéléo. La pluie ne nous permet pas de profiter du bon plat mijoté par Guilhem que nous serons contents de retrouver à notre sortie. La nuit n’est pas reposante pour tout le monde. Guilhem doit se réfugier dans son 4X4, loué pour l’occasion, chassé de son hamac par la pluie. Pour ma part, la pluie qui glisse sur ma tente me berce et apaise mes craintes. Au réveil, je suis en forme et j’ai hâte.
9:30: nous entrons. (Cf photo 1). Rémy part le premier. Il a une idée de photo en tête et veut nous attendre en bas du grand puits. (Cf photo 2)Pierro le suit, puis Fleur. Je passe ensuite et Guilhem ferme la marche. Les fractio s’enchaînent. L’équipement est parfait. La corde est neuve et glisse bien. La descente est très agréable. Elle le sera encore plus une fois que mes longes auront été réglées à la bonne longueur. Je n’aurais pas imaginé que ça fasse une aussi grande différence!Le grand puits est impressionnant. Mais plus par ce qu’on en sait que par ce que l’on voit. L’obscurité le rend moins impressionnant que ce que je n’aurais cru.
Nous continuons à progresser. Pierro équipe. Les pauses qu’il nous laisse sont juste suffisantes pour que les muscles se reposent. Pas assez longues pour qu’on ait froid. Les kits sont lourds et nous sommes bien contents de ne pas avoir à les remonter Nous arrivons à-300. Nous laissons notre kit repas dans la diaclase de Pâques. Je ne suis pas fatiguée. Et déjà très contente d’avoir atteint cette profondeur.
La suite est plus dure. Plus technique. Avec des désescalades et un impressionnant pendulaire dont je me demande encore comment Pierro a réussi à l’équiper. J’aurais aimé voir ça… Les désescalades sont ma bête noire. C’est un peu honteuse que je m’entends encore hurler au secours. La voix de Fleur me rassure. Rémy revient sur ses pas pour m’aider. Guilhem m’aide pour la suivante qui s’avère cependant plus facile.
Après le puits de l’araignée, nous atteignons la salle de la lune. Nous sommes à 500 mètres sous terre. Avec beaucoup de tact, Pierro me conseille de m’arrêter là. Je suis en proie à des émotions contraires. Être arrivée jusqu’ici et ne pas faire les derniers 70 mètres, louper le plus joli de la grotte, ne pas voir le lac… mais en même temps, fierté d’être arrivée jusque là (après tout, je n’ai que quelques mois de spéléo derrière moi) et soulagement devant cette proposition. En effet, je dois me rendre à l’évidence. Je suis épuisée et il reste encore le retour! A tout hasard je demande si la suite est technique. Oui. Il n’est donc pas question pour moi de tergiverser. La raison m’impose de rester. Guilhem fait de même. Rémy reste aussi bien qu’il n’ait pas l’air fatigué. Nous avançons tout de même jusqu’à l’entrée du dernier puits. Histoire de voir les premières concrétions. Et de faire une photo de notre équipe à -500. (Cf photo 3)
En attendant Pierro et Fleur qui sont descendus pour toucher le fond, nous croisons l’équipe des déséquipeurs. Ils ont fait vite pour nous rejoindre! Nous entamons alors le retour. La première partie est épuisante. Quand Fleur et Pierro nous rattrapent au niveau du pendulaire, il nous explique comment le prendre en économisant notre énergie. Trop tard pour moi, je suis déjà de l’autre côté. Mais Guilhem profite de la leçon. Lorsque nous arrivons à moins 300, je n’en mène pas large. (Cf photo 4)La soupe chaude est la bienvenue. Le moment de repos aussi. Il est aux alentours de 15:00. Le temps s’échappe sous terre…
Rémy propose de faire deux équipes. Une équipe rapide (Pierro et Fleur qui mettront 2 h de moins que nous). Et une équipe “qui va à une vitesse plus modérée”. L’expression m’amuse. Rémy choisit de rester avec Guilhem et moi. À son “je suis là pour ça”, je devine que l’épuisement se lit sur mon visage. Il me semble même qu’il commence à douter que je puisse finir sans son aide. Sursaut d’orgueil ou effets du repos? Je suis prête à redémarrer. L’ascension est moins technique sur cette partie. Et même si les muscles tirent, les fractio s’enchaînent. Rémy propose une dernière halte en bas du puits d’entrée. Plus que 167 mètres!
Après qq minutes de repos Rémy remonte. Guilhem et moi prenons plus de temps. Ou plutôt, Guilhem m’attend et se met à mon rythme. Renfiler les gants humides n’a rien d’agréable après la chaleur du point chaud. Mais nous savons qu’après seulement qq mètres sur la corde nous n’aurons plus froid du tout. La remontée avance bien. Lentement. Mais sûrement. Quelques pauses me sont nécessaires. J’entends Guilhem en-dessous qui me demande régulièrement si ça va. Alors je redémarre.
Lorsque je sors du trou il est 21:30. Je tombe littéralement dans les bras de Rémy qui m’accueille avec un “TPST 12h”. Viennent ensuite les félicitations de Pierro. Je ne sais pas ce qui se lit le plus sur mon visage entre le soulagement, la fatigue et la joie. Mais à l’intérieur, l’émotion dominante est, de loin, une immense fierté! Je l’ai fait!!!
Guilhem sort juste après moi. Il transpire du casque ce qui amuse beaucoup Rémy. Nous rejoignons Fleur au campement où nous profitons ensemble du bon petit plat abandonné la veille que nous réchauffons au feu de bois. (Cf photo 5) Nous sommes tous fatigués. Mais tellement heureux!
Blandine


