Carnet de route

CHANCE A NOUS !

Le 17/10/2022 par LECLERCQ Michel

Il est 10 heures sur le parking de Saint Guilhem du Désert où le groupe de débutants / curieux que je dois encadrer dans la belle rando rappel dite du "VERTIGE", se retrouve.

Nous avons Sylvie qui co-encadre la sortie, Djamel qui est un alpiniste et Violette, Pauline, Mathieu et Jean-Michel qui sont débutants et nouveaux adhérents au CAF.

D'emblée, l'ambiance est bonne et nous rejoignons allègrement la cascade finale du Verdus pour faire le briefing traditionnel de bienvenues, de recommandations et d'explications sur l'usage et l'apprentissage du matériel de rappel...

La via cordata qui mène aux sites d'escalade se grimpe facilement et nous entamons la montée du pierrier et de la falaise qui conduit à la deuxième via cordata verticale de 30 mètres.

De nouveau le groupe avance bien voire très bien pour des néophytes.

Nous arrivons donc au passage le plus technique de cette sortie, le rappel oblique qui domine vertigineusement le Verdus.

Comme d'habitude, pour faire passer les gens en sécurité et sans trop de stress, j'instale un guidé ou une main courante qui, une fois longée, évite à la personne de partir dans le vide.

Ils sont doués les petits, pas trop de stress et toujours de la gaieté et du plaisir.

Nous progressons ensuite sur un balcon étroit équipé aux endroits dangereux de mains courantes pour atteindre l'endroit ou l'on doit monter raide jusqu'au sommet des falaises qui dominent le vallon de Saint Guilhem et font face aux falaises de la Bissone.

Au caïrn sommital nous faisons une belle pause casse-croûte où chacun profite de cette vue exceptionnelle et d'un magnifique soleil.

Mais il ne faut pas trop s'attarder car la suite est encore longue.

Sylvie équipe en main courante rappelable le rappel de 30 mètres qui mène à celui de 60.

Rappel sensation de cette sortie.

Je pars en tête pour équiper ce magnifique rappel suivi de Djamel qui porte la deuxième corde de 60 mètres.

Nous arrivons au relais confort et chaîné que j'équipe en débrayable, technique canyon pour ne pas toncher les cordes car deux gros frottements sont à gérer dès les premiers mètres du rappel.

La méthode consiste à rabouter les deux cordes de 60 par un noeud de jonction et de débrayer la corde de descente afin qu'elle ne soit jamais en arrêt sur les deux arêtes coupantes du départ.

Je demande à Djamel, arrivé en bas, d'assurer les débutants en tenant la corde au cas d'un ennui.

Sa descente et celle de la majorité du groupe s'effectue sans encombre.

J'entends les exclamations d'admiration, de sensation, de crainte aussi et je suis heureux de rendre heureux. C'est pour moi le propre d'un encadrant de donner envie d'avoir envie de continuer...

Arrive Jean-Michel qui est le dernier du groupe et qui était à la journée découverte des rappels le week-end dernier au Verdus.

Il est à l'aise et commence tranquillement sa descente. A peine a-t-il passé l'escalier aux deux tranches coupantes et disparu dans le vide de la falaise que je vois, horrifié, un bloc de 80/100 kilos se détacher de la margelle où je suis et partir dans le vide.

En un éclair je réalise le danger extrême et les conséquences qui en découlent...

PIERRE, je hurle ce mot que tout montagnard craint d'entendre dans les ascensions, PIERRE, et qui veut dire planquez-vous, fuyez si vous pouvez et protéger-vous de l'impact qui arrive.

De mon relais je vois le groupe en bas qui fuit tout azimut car ils ont vu la dimension du rocher qui vient vers eux et c'est la panique.

Mais mon gros souci c'est Jean-Michel que je ne vois pas et pour qui j'imagine le pire.

Je débraye la corde et je sens qu'il est encore dessus. Je l'entends me dire "ça va !".

Puis je sens la corde libérée et je vois le groupe s'afférer autour de lui.

Djamel me fait un signe pousse levé vers le haut qui me calme un peu.

Rapidement je les rejoins.

Je croise le regards de Mathieu et Pauline pas encore remis de leur frayeur et me disant qu'il y a un souci.

Sylvie, infirmière, s'occupe de Jean-Michel qui est allongé inconfortablement à l'ombre sur un pierrier.

On lui lève les jambes pour qu'il récupère car il est choqué et en malaise vagal.

Son avant bras et poignet gauche sont bien entaillés et notre infirmière urgentiste lui a confectionné un pensement compréssif au niveau de la pliure du poignet et une écharpe de soutien à l'aide d'une sangle d'escalade.

On fait le point sur la situation.

Jean-Michel est blessé, il est conscient et ne souffre pas trop. Il a eu par contre très peur et doit se remettre de ses émotions.

Les autres vont bien à part Pauline qui s'est cognée un genou dans sa fuite, mais rien de problématique pour quitter les lieux.

Vu l'état de notre blessé il n'est plus question de continuer la sortie par la voie normale car trop technique, trop longue et nécessitant l'usage des deux mains. Cependant, son état lui permet encore de se déplacer et vu les difficultés d'accès, même pour les pompiers secours, au site où nous nous trouvons, nous décidons faire un auto-secours.

Nous sommes en haut de la deuxième via cordata verticale et je décide donc de redescendre notre ami par notre chemin du départ jusqu'au bas du Verdus où nous seront enfin sur du terrain horizontal pour rejoindre nos véhicule et l'hôpital, car Sylvie me signale discrêtement qu'il a une blessure sérieuse au niveau du poignet.

Occupez-vous de lui le temps que j'équipe un relais, pour le mouliner, c'est à dire lui faire descendre les points verticaux sans qu'il ait à gérer la corde.

Mathieu suit moi. J'équipe la corde de descente pour Jean-Michel et place Mathieu au milieu de la via pour qu'il rassure et guide la victime.

Suivent Violette et Pauline pour le récupérer en bas de la paroie.

Arrivent enfin Sylvie, Jean-Michel et Djamel. Sylvie part puis je mouline le blessé jusqu'au bas de la falaise avec Djamel à ses côtés. ça se passe relativement bien.

Nous entamons un gros pierrier puis plusieurs parties verticales qui n'écessitent d'effectuer de nombreux moulinages afin d'arriver enfin au final du Verdus.

Là nous sommes rejoints par des grimpeurs dont un médecin qui ausculte sommairement Jean-Michel et le rassure. Menez-le à la clinique Saint Roche "urgence main".

Nous le remercions et rejoignons nos véhicules, tout de même heureux et soulagés.

Une photo du groupe de rescapés et direction la clinique Saint Roch à Montpellier où je laisse notre ami entre de bonnes mains.

Dans la soirée il m'informe du diagnostic de ses blessures : trois tendons sectionnés et quelques pierres incrustées dans l'os du poignet.... six semaines d'arrêt de travail, plus de la kiné... Il sera opéré dans la matinée de dimanche et cette intervention s'est très bien déroulée.

Dans ce malheureux accident, la chance, le ciel, nos bonnes étoiles, Dieu peut être étaient à nos côtés et nous ont protégés. Bien sûr Jean-Michel tu es blessé et c'est ennuyeux, mais moi qui ai vu  ce bloc partir vers toi, je peux t'assurer que tu as eu une chance ENORME.

Les autres en bas de la falaise aussi et ce sont des moments aussi intenses qui nous font encore plus apprécier la VIE !

Nous faisons des sports de montagne, de pleine nature, peu importe nos niveaux, nos maîtrises, nos expériences le risque d'accident fait partie de ces activités que nous avons choisies et même en faisant tout pour éviter le pire, le danger est toujours présent et souvent aux moment où l'on s'y attend le moins.

Voilà je voulais faire part de cette journée mémorable qui a tout de même une fin heureuse.

 

 

CLUB ALPIN FRANCAIS MONTPELLIER

6 RUE DE LA POESIE
34000  MONTPELLIER
Permanences :
jeudi de 19h30 à 20h30